Saturday, October 19, 2024
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Dans L’Union Européenne, la Taxe Carbone Aux Frontières en Phase de Test

L’Union européenne a lancé dimanche 1er octobre une première phase de test “à blanc” de la taxe carbone aux frontières. Le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), adopté le 18 avril par le Parlement européen, oblige les entreprises qui importent au sein de l’UE “des marchandises à forte intensité carbone” des secteurs du fer et de l’acier, de l’aluminium, du ciment, des engrais et de l’électricité, à payer une taxe sur le CO2 émis lors de leur fabrication à l’étranger. Cette mesure a pour but d’inciter l’ensemble des industriels, d’Europe et d’ailleurs, à investir pour limiter leurs émissions de CO2. Elle attire cependant de nombreuses critiques de la part des entreprises européennes. Explications.

  • Une mesure du Pacte vert européen

La taxe carbone aux frontières, appelée officiellement “Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières”, est issue d’un accord trouvé le 13 décembre 2022 entre le Parlement et le Conseil européens après des années de débats et de tractations. Elle s’inscrit dans le cadre du Pacte vert européen, le plan de lutte contre le dérèglement climatique, et l’objectif ambitieux d’atteindre la neutralité carbone sur le continent d’ici 2050.

Le principe est simple. Jusqu’à présent, pour réduire son bilan carbone, l’UE agissait essentiellement pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre générées sur son territoire. Désormais, elle veut s’attaquer aux émissions qu’elle produit à l’étranger, à travers, notamment, les entreprises et les industries.

Concrètement, depuis le 1er octobre, les entreprises qui veulent importer dans l’UE des “marchandises à forte intensité carbone” fabriquées à l’étranger doivent déclarer les émissions de CO2 liées à leur production. Et, dans un deuxième temps, à partir de 2026, ces émissions générées à l’étranger seront taxées.

Par exemple, si une entreprise française veut importer de l’acier issu de Chine, elle devra payer un certain prix pour compenser le carbone émis lors de la production de cette matière première.

  • Lutter contre les “fuites de carbone”

À travers ce mécanisme, l’UE espère inciter les entreprises à investir pour limiter globalement leurs émissions. Mais surtout, elle souhaite éviter les “fuites de carbone”.

Au sein de l’UE, les entreprises doivent depuis 2005 acheter des crédits carbone ou des quotas pour compenser leurs émissions de CO2. Problème : ces crédits ont vu leurs prix massivement augmenter au fil des années au point que de plus en plus d’entreprises préfèrent délocaliser une partie de leur production à l’étranger pour y échapper. En élargissant cette nécessité à la compensation des émissions produites à l’étranger, la taxe doit ainsi loger tout le monde à la même enseigne.

Ce mécanisme “met sur un pied d’égalité le fait de produire de l’acier, par exemple, au sein de l’Union européenne” ou en dehors puis de l’importer, a salué le gouvernement français lors d’une conférence de presse vendredi.

  • Acier, aluminium, hydrogène

Cette taxe aux frontières ne concernera au départ que certaines matières premières – celles qui émettent le plus de CO2 : l’acier, l’aluminium, l’ammoniac, le ciment, l’électricité ou encore l’hydrogène et l’engrais. L’ensemble de ces secteurs représente plus de 50 % des émissions industrielles du continent européen, selon le Conseil de l’UE.

Le mécanisme devrait cependant s’étendre à terme à une plus large catégorie de produits, notamment ceux qui ont besoin de ces matières pour leur construction. Par exemple, un importateur de voitures dans l’UE devra payer la taxe sur l’acier, des constructeurs du bâtiment celle sur le ciment, etc.

  • Une mise en œuvre progressive d’ici 2026

La mise en place de cette mesure inédite doit se faire progressivement, avec une première échéance en 2026. “Le 1er octobre 2023, le MACF entre dans une première phase de mise en œuvre que l’on appelle ‘à blanc’ jusqu’à fin 2025″, a indiqué le gouvernement français. Cette première phase doit permettre “sans imposer de prix à ce stade” de “récolter beaucoup de données de la part de nos industriels” afin “d’évaluer le juste prix” des émissions à l’importation.

Les importateurs commenceront effectivement à payer la taxe à partir du 1er janvier 2026 et son prix augmentera progressivement pendant neuf ans, jusqu’en 2034.

Comment le prix sera calculé ? L’entreprise déclarera les émissions liées à son processus de production et, si elles dépassent le standard européen, elle devra acquérir un certificat d’émission au prix du CO2 dans l’UE. Si un marché carbone existe déjà dans le pays où elle est implantée, mais avec un prix du carbone moins élevé qu’en Europe, comme c’est le cas actuellement en Chine et dans certains États américains, elle devra seulement payer la différence. Pour éviter une sous-déclaration, elle devra aussi se soumettre à une certification indépendante.

Cette taxe pourrait rapporter à l’Union européenne environ “3 milliards d’euros en 2030, et sans doute plus après”, au fur et à mesure qu’elle entrera en vigueur, selon le gouvernement français.

  • Inquiétude des entreprises

Depuis l’annonce de cette mesure, de nombreuses entreprises européennes sont vent debout, craignant que cela nuise à leur concurrence sur le marché en créant un déséquilibre entre les prix des produits européens et non européens. En effet, la majorité des marchés extérieurs ne connaissent pas ce système de compensation carbone. Les entreprises étrangères n’ont pas à s’acquitter de ces sommes ou à bien moindre échelle. Et n’ont donc pas à le répercuter sur les prix de leurs produits.

De son côté, Bruxelles assure espérer ouvrir la voie et forcer d’autres pays à réduire eux aussi leurs émissions. Cela “incitera nos partenaires commerciaux” à renforcer leur action climatique, assurait encore le gouvernement français vendredi, évoquant un “effet contagieux”.

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