Tuesday, November 19, 2024
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Laurence Boone : “Quand on Vote, on Peut Déverrouiller L’Emprise Des Populistes”

Les 27 ont été fort occupés cette semaine : sommet extraordinaire sur la réponse européenne à apporter à la guerre qui sévit au Proche-Orient, sommet sur l’élargissement de l’UE, deux attentats perpétrés en France et en Belgique, et des élections en Pologne qui ont sonné le retour en force de l’opposition pro-européenne de Donald Tusk. Retour sur tous ces sujets avec Laurence Boone, la secrétaire d’État française chargée des Affaires européennes. 

Guerre Israël-Hamas : “L’Union européenne n’est pas du tout naïve”

L’Europe arrive-t-elle à parler d’une seule voix lorsqu’il s’agit de la guerre qui oppose Israël au Hamas ? Lors de sa visite en Israël, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a soutenu sans réserve le pays dans sa riposte contre l’attaque du Hamas. Pour Laurence Boone, “cette déclaration n’est que sa position”. Et elle poursuit : “Le président du Conseil européen, Charles Michel, a rapidement publié un communiqué et convoqué un sommet extraordinaire lors duquel les 27 pays membres de l’UE se sont exprimés exactement tous sur la même ligne : on condamne les attaques terroristes du Hamas contre Israël et on réaffirme le droit d’Israël à répliquer, dans le respect du droit humanitaire et du droit international”.

L’UE a, par ailleurs, annoncé le triplement de son aide humanitaire à destination de la bande de Gaza, la portant à 75 millions d’euros “afin d’aider les civils qui en ont le plus besoin”. Mais sera-t-il possible de veiller à ce que cette assistance ne soit pas détournée par le Hamas ? “L’Union européenne n’est pas du tout naïve”, affirme Laurence Boone. “Il y a besoin de vérifications accrues, et c’est pour ça qu’on explique que ça passera par le sud de la bande de Gaza, par l’Égypte, et qu’on fera très attention à la fois à protéger les civils et à ce qu’ils bénéficient de cette aide”.

“Rester unis” après les attentats à Arras et à Bruxelles

L’UE a connu deux attaques terroristes sur son sol en une semaine. En France, un professeur a été assassiné dans l’enceinte de son établissement par un Russe de 20 ans y ayant étudié et se revendiquant de l’organisation État islamique. “L’école, c’est tout ce qui représente la démocratie, le savoir contre l’obscurantisme. (…) Il faut absolument qu’on en ait vraiment conscience, parce que c’est à ça que nous, en retour, on doit s’attaquer. À ces personnes qui s’attaquent à nos libertés et à nos démocraties”, réagit Laurence Boone.

Quelques jours plus tard, en Belgique, deux Suédois ont été tués par un Tunisien en situation irrégulière, en représailles à un autodafé du Coran dans le pays scandinave cet été. La coordination européenne “est essentielle parce que ce que cherchent à faire toutes ces personnes, c’est à nous diviser pour saper les fondements de notre démocratie”, affirme Laurence Boone. “La réponse qui doit être notre boussole, c’est de rester unis face à cette idée. (…) La démocratie, ça n’est jamais acquis”.

Pour la secrétaire d’État française chargée des Affaires européennes, “les terroristes étaient sur notre territoire”, donc la solution ne passe pas forcément au renforcement des frontières de l’UE : “Elles ont déjà été renforcées à l’extérieur, avec une montée en puissance jusqu’à 10 000 personnes d’agents Frontex. Et quand il y a une menace sur notre territoire, bien évidemment, nous renforçons aussi les contrôles aux frontières à l’intérieur. C’est prévu dans le cadre de l’Union européenne”.

Victoire de Donald Tusk en Pologne : “On ne va pas cacher notre plaisir”

“C’est fantastique ce qu’il s’est passé en Pologne !” : tels sont les premiers mots de Laurence Boone pour réagir à la victoire de l’opposition pro-européenne de l’ancien président du Conseil européen Donald Tusk lors des législatives, le 15 octobre. Un succès qui met fin à huit années d’un gouvernement ultraconservateur du parti Droit et Justice (PiS). “On ne va pas cacher notre plaisir. (…) On va pouvoir travailler avec des personnes qui pensent de façon républicaine et en direction pro-européenne”, se félicite Laurence Boone, qui salue aussi le score de la participation (74 %) lors de ce scrutin : “C’est colossal par rapport à ce que l’on voit ailleurs”, surtout si l’on considère que 63 % des 18-29 ans sont allés voter. “C’est un appel à la jeunesse : quand on va voter, on peut changer le cours des choses”, souligne-t-elle.

Mais ce résultat n’efface pas les huit années de politiques ultraconservatrices du PiS et “même quand le gouvernement de coalition pro-européen sera nommé, il va falloir inverser tout ce qui a été fait pour verrouiller les structures de l’État. (…) Il va falloir travailler dans la durée pour renverser ces structures et en remettre en place qui soient démocratiques, équilibrées, justes et qui sont dans l’intérêt général et pas dans l’intérêt d’un parti”, prévient Laurence Boone. Le PiS a aussi mis en cause ces dernières semaines l’aide à l’Ukraine : “C’est une erreur majeure de la campagne du PiS (…) et Donald Tusk l’a dit dans sa campagne, il soutiendra l’Ukraine et dans la durée, comme le reste de l’Union européenne”.

Ce résultat en Pologne ne doit, toutefois, pas faire oublier l’élection du populiste slovaque Robert Fico, le 30 septembre. Ce dernier va faire alliance avec l’extrême droite et refuse l’aide militaire à l’Ukraine, ainsi que le maintien au pouvoir depuis 13 ans de Viktor Orban en Hongrie, que l’on a récemment vu aux côtés de Vladimir Poutine lors d’un sommet en Chine. Laurence Boone ne s’en émeut pas et rappelle que “le front européen, c’est 25 sur 27”, mais elle n’hésite pas à commenter l’attitude de Viktor Orban : “Franchement, il va un peu trop loin. Il faut rappeler que quand on bénéficie d’investissements chinois, on a un prix à payer après. Avec l’Union européenne, quand on bénéficie d’investissements, c’est pour faire partie de cette grande famille et cette grande famille qui respecte la démocratie et la liberté”.

Européennes 2024 : “Façonner notre destin commun”

Le 9 juin 2024 marquera le résultat des élections européennes. Un scrutin incontournable selon Laurence Boone : “L’Europe, c’est à peu près un tiers de notre cadre juridique. (…) Le Parlement européen a du pouvoir qui façonne à la fois notre vie quotidienne dans le court terme, mais aussi sur la durée. (…) Ça marche par des alliances pour faire aboutir des textes. Il faut donc s’assurer d’être représentés par des personnes qui vont être capables de forger des alliances – et ça, je vais être très claire, ni l’extrême droite ni l’extrême gauche ne savent faire ça – de façon à pouvoir façonner notre cadre, notre destin commun qui est celui d’être une grande région démocratique, diverse mais unie, avec la transition énergétique, avec un modèle social à préserver”.

Elle ne s’exprime, cependant, pas sur la future tête de liste du parti présidentiel français Renaissance lors de ces élections, même si la course se joue entre l’actuel chef du groupe Renew au Parlement européen, Stéphane Séjourné, le Commissaire français, Thierry Breton, et elle-même : “Ce n’est pas une question de personne, c’est une question d’ADN, de ce qui définit notre majorité, qui est la seule majorité véritablement pro-européenne”. 

Élargissement des 27 : “Le chemin pour faire partie de l’UE est nécessairement long”

Le club européen compte 27 membres mais pourrait bien s’élargir. Il en était question lors d’un sommet des Balkans occidentaux à Tirana cette semaine. Laurence Boone, présente sur place, ne croit pas que la France soit mal perçue car tentée de promouvoir une Europe à plusieurs vitesses : “Le Premier ministre albanais Edi Rama convient que le chemin pour faire partie de l’Union européenne est nécessairement long”, précise-t-elle, “et il n’y a pas d’incompréhension de la part d’un de ces pays sur la durée que ça prend. Il peut y avoir une fatigue parce que ça fait longtemps que ça dure”, reconnaît-elle.

Et de son côté, l’UE ne peut pas accueillir de nouveaux membres sans procéder à des changements également au sein de ses institutions : “L’ensemble des 27 a reconnu qu’il fallait changer l’Union européenne en même temps que les pays qui sont candidats à l’adhésion se changent pour s’aligner sur nos institutions. C’est un travail qui va nous prendre cinq, dix ans peut-être”, conclut-elle.

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